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ROM et JULY

fond noir

Argot et vocabulaire de banlieue

Jean-Pierre GOUDAILLER, professeur de linguistique et directeur du Département de Linguistique Générale et Appliquée de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales-Sorbonne de l'Université René Descartes (Paris 5).
Comment tu tchatches ! Dictionnaire du français contemporain des cités.

François CARADEC,
N'ayons pas peur de mots. Dictionnaire du français argotique et populaire.

Jean-Paul COLIN, professeur à l'Université de Franche-Comté, Besançon et Jean-Pierre MÉVEL,
Dictionnaire de l'Argot.

5 hommes 7 Femmes

DÉCOR

 

Un square de banlieue.

Jardin: les reliquats d'une statue de Maurice Thorez.
Cour: un immeuble d'un étage avec un petit balcon.
En arrière-plan (éventuel): images d'immeubles de banlieue.

COMMENTAIRES

 

Le texte est écrit principalement en argot classique.

Metteurs en scène et acteurs sont immédiatement rebutés par la difficulté.

En réalité, on s'y habitue très vite, dès la première répétition, et on passe immédiatement de l'inquiétude à l'amusement .

Décor, lieu et commentaires


PERSONNAGES

Deux familles occupent  les abords du square Maurice Thorez.

Côté jardin:

Bisness (le magouilleur)

La Charclo (clocharde)

Rom (Romeo)

Baltringue (l'idiot)

Côté cour:

L'Arhnouche (policière, flic, fliquesse)

July (Juliette)

Flambeur (personne qui cherche à en mettre plein la vue)

Les clients du repas:

Charles-Albert de Noblecourt

Ginette Maigre

Margo Bouchard-Dugenou

Roberta Montaldo

Viriginia de Noblecourt

Intrigue

 

 

 

 

Bisness se plaint de la simplicité d'esprit de Baltringue.

Bisness veut organiser un repas original" "tout compris".

Bisness et La Charclo se désolent que leur fils Rom soit amoureux de July, fille d'une ilotière.

La Charclo part à la recherche de poubelles intéressantes pour le repas.

L'Arhnouche, mère de July. Sa profession est totalement incompatible avec celle de Bisness. Rom veut tout affronter, notamment Flambeur, le frère de July.
July est à sa fenêtre au 1er étage.
Rom transporte une échelle.

Baltringue se cache sous l'échelle et souffle des mots d'amour à Rom.

Baltringue et Flambeur s'affrontent.

Rom intervient un couteau à la main, il atteint Flambeur qui ne bouge plus.
Rom revient pour faire ses adieux à July.

Elle craint de succomber à tous ces malheurs.
Flambeur réapparait.

Baltringue le prend pour un fantôme.
La Charclo tente de convaincre Rom de rejoindre July.

Bisness, Baltringue et La Charclo, qui a ramené les éléments du repas, installent la table pour le banquet.

Le saumon fumé pue à trois kilomètres.

Les "clients" fuient devant les odeurs.
Rom et July refusent de mourir et partent en amoureux.

SYNOPSIS

 

 

EXTRAIT

Première scène très importante: il faut habituer le public à la langue.

La scène 1 est faite pour ça.

Les deux acteurs ont la responsabilité d'habituer le publique au texte en parlant un peu lentement et en marquant le vocabulaire.

Bisness :

Mon p’tit Baltringue, t’es louf, j’y peux rien, mais j’ t’aime bien quand même. Bon ! Ouvre bien tes écoutilles.

Tu connais Marcel, le chineur ?

Baltringue :

Çui d ’ la rue Albert Lebrun ?

Bisness :

Oui, « çui d ’ la rue Albert Lebrun ».

C’est pas possible c’ que tu causes mal, Baltringue.

Tu pourrais pas faire un effort et tchatcher comme un fils de Clovis !

Baltringue :

Je tchatche comme je tchatche.

C’ qui compte, c’est qu’ tu captes c’ que j’ te dis.

 

Bisness :

O.K., j ’ understand  !

Bref, Marcel le chineur, il a un appentis derrière chez lui.

Tu m ‘ suis ?

 

Baltringue :

Ça dépend où tu vas.

 

Bisness :

[s’énervant] J ‘ vais nulle part, j ‘ t ‘ « essplique ». Bon !
J ‘ vais avoir besoin d ‘ planches.

 

Baltringue :

Qu’est-ce que tu veux bouffonner avec des planches ?

 

Bisness :

T’occupes !

Tu vas aller lui démonter l’appentis, au Marcel, et amener les planches ici.

 

Baltringue :

T ‘ es louf ou quoi ?

Pourquoi qu ‘ j ‘ démont’rais pas l ‘ commissariat, pendant qu ‘ tu y es ?

 

Bisness :

 J ‘ te d’mande pas d ‘ commentaires, j ‘ te dis c ‘ qui faut faire.

 

Baltringue :

(pas convaincu) Ah !

 

Bisness :

Le Marcel, qu ‘ est-ce tu veux qui fasse d’un appentis ?

En plus, i ‘ doit avoir plein de fafiots chez lui, vu qu’ il a pas confiance dans les banques.

T ‘ iras faire un p’tit tour dans son « appart », quand t’auras démonté l’appentis.

 

Baltringue :

Mais, dis, Bisness, c’est-y pas du vol, ça ?

 

Bisness :

Baltringue, ne dis pas n’importe quoi !

Je chourave jamais personne, moi.

 

Baltringue :

Ah bon ?

 

Bisness :

Non, Môssieur !

Je fais dans le social, moi, comme Robin Hood.

 

Baltringue :

Qui c’est c’ lascar, j ’ le connais pas.

L’est pas du quartier !

 

Bisness :

Robin Hood, Robin des Bois, pauv’e nase, un héros qui prenait aux riches pour donner aux pauvres.

Je prends au Marcel, qu’est riche.

 

Baltringue :

Tu prends au Marcel qu’est riche, mais tu donnes pas aux pauvres.

 

Bisness :

Qui c’est l ’ plus pauvre ?

 

Baltringue :

J ’ sais pas.

 

Bisness :

C’est moi... Bisness ! Un vrai SDF.

 

Baltringue :

Un SDF ?

 

Bisness :

Un Sans-Dollars-Fixes.

 

Baltringue :

O.K. ! Tu prends les fafiots du Marcel qu’est riche.

Mais après, c’est toi qui s’ras plein aux as.

 

Bisness :

Pas qu’un peu.

 

Baltringue :

C’est donc pas moral, ton truc.

 

Bisness :

Que si ! Parce qu’après, tu m ’ prendras les biffetons.

C’est toi qui s’ras riche et moi, d ’ nouveau SDF.

 

Baltringue :

Mais alors, qui va m ’ piquer les kopecks pour qu ‘ ça soit honnête ?

Bisness :

Moi ! Et ainsi de suite : à toi, à moi, à toi, à moi.

Comme ça, on n’est jamais riche et on donne toujours aux pauvres.

 

Baltringue :

J’entrave pas tout, mais ça doit être rudement réglo.

 

Bisness :

Plus réglo, tu meurs.

 

On entend une sonnerie. Bisness sort un natel de sa poche.

 

Baltringue :

Qu’est-ce c’est ce truc ?

 

Bisness :

Un natel, panouille !

Faut vivre avec son temps.

 

Baltringue :

Tu vas calculer le nombre de biffetons qu’on va récupérer chez le Marcel.

 

Bisness :

C’est pas une machine à calculer.

C ‘ que t’es lourd, des fois.

C’est un téléphone.

[Appuyant sur un bouton] Allo !... Oui, c’est bien ici !...

Vous parlez au directeur soi-même en personne.

 

Baltringue :

[stupéfait] Au directeur ?

 

Bisness :

[à Baltringue] Ferme-la !

[Au natel] Voui ?... Certainement, chère Madame, on n’attend plus que vous...

Square Maurice Thorez, c’est ça même...

À tout bientôt !...

Mes hommages s’écrasent à vos pieds, chère Madame !

 

Bisness appuie sur un bouton et range son natel.

                      Baltringue :                     

C ‘ que tu causes bien, Bisness !

C’était qui ?

 

Bisness : 

Ça t ‘ regarde pas !

 

Baltringue :

[vexé] Allez, Bisness, dis-le moi qui c’était avec tes z ’ hommages z ‘ à ses paturons.

 

Bisness :

Oh, et puis, c’est p’t-êt’e pas plus mal qu ‘ tu sois au parfum.

Mais tu la boucles, hein ? Juré ?

 

Baltringue :

Juré... sur le caisson de... de Maurice Thorez.

Bisness :

Ouais ! Tu risques pas grand-chose.

Bon !... J’ai trouvé une combine.

 

Baltringue :

Encore ?

 

Bisness :

Qu’est-ce tu crois, ça carbure là-d’ssous.

J’ai fait passé une p’tite annonce dans un canard : « Participez au repas le plus original de l’année.

Tous frais compris ».

Pis... mon numéro d ‘ bigophone.

Ben, figure-toi qu ’ i y a plusieurs pigeons qu’ont appelé.

 

Baltringue :

[stupéfait] Non ?

 

Bisness :

Le repas, ça s’ra ici... d’où les planches.

 

Baltringue :

Pis... qui c’est qui va faire la cuisine ?

 

Bisness :

La Charclo.

 

Baltringue :

La Charclo, elle sait pas faire la cuisine.

 

Bisness : 

Non, mais elle sait la rapporter.

Extraits
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